Presse

Ras l'front n°15, sept./oct. 1993.

Mustapha et Magyd font partie du groupe toulousain Zebda et de l'association que ces derniers anime "Vitécri". Au programme, travail et animation dans les quartiers nord de Toulouse, avec notamment un festival, Ça bouge au nord. Une belle réussite à laquelle RLF Toulouse est régulièrement invité. Sans compter les autres occasions de faire des choses ensemble...

Ça bouge au nord... de Toulouse avec le groupe Zebda et l'association Vitécri.

Sur quatre quartiers, pendant un mois, ce qui a été fait au cours de l'année se rassemble : de peinture en musique... Ça bouge au Nord n'est pas un festival en soi, c'est l'aboutissement d'un an de présence sur le quartier. C'est la concrétisation de tout un investissement de la part des associations. Et ce n'est pas qu'un coup ponctuel : le festival est le rouleau compresseur, un plus où des moyens sont mis à notre disposition pour que tout explose, qui nous permet d'aller plus loin dans notre travail quotidien.

Nous, on est des privilégiés, on a eu un cursus scolaire. Beaucoup de jeunes sont largués. Alors, on s'improvise animateur, comme des sauveurs (putain de sauveurs !).

On doit être des rêveurs, on veut arranger la vie On croit qu'on peut changer les choses dans un monde qui est naze, pour raccrocher les mômes à l'envie de vivre, d'être quelqu'un.

Et par rapport à la pression qu'exerce l'extrême droite en France, avec les renoncements de la gauche, par exemple le droit de vote, l'adoption des lois sécuritaires, les Arabes, les Blacks, la jeunesse en général ne se donnent pas les armes qui permettraient de diriger les choses. Dans tous les actes quotidiens il faut réagir. Il y a toujours quelque chose à faire localement. Aujourd'hui tu peux arriver à un niveau de dégoût dont le résultat est l'absence de perspectives. Avant d'en arriver là, il faut s'investir dans le militantisme.

Dans les quartiers nord le Front national n'a de présence militante, mais ses idées, oui.

Alors, on essaye de présenter une autre façon de fonctionner, une autre façon de voir les choses, de recréer les solidarités, de responsabiliser les gens au quotidien, ce sont des petites choses qui permettent à des gosses d'avoir un coin qu'ils gèrent eux-mêmes. C'est vraiment en étant sur le terrain, au quotidien, qu'on peut faire avancer les idées de solidarité. Dans la cité, y'a pas un facho qui circule, ils n'y rentrent pas. Par contre à Toulouse en centre-ville, on a des problèmes.

Sur nos quartiers l'intégrisme est marginal, il n'a pas de prise. Ici il y a encore de l'humanité, des rencontres qui font qu'il n'y a pas de rejet de l'autre, pas de haine. Mais si le quartier est touché par la crise, il sera plus sensible à toutes les pénétrations : intégrisme à l'encontre des musulmans, Front nationalisme à l'égard des Français. Plus le ghetto est présent, plus le FN et les intégristes et l'intolérance se développent : le principe est le même.


© La résistible ascension du F. Haine - Ed. Syllepse, 1996